Les ambivalences du réel
par Anthony GLINOER & Michel LACROIX
Présentation du volume
Volontiers snobé par les écrivains, qui pourtant l’ont souvent pratiqué, le roman à clés est suspect. Il ne l’est pas moins aux yeux des universitaires adeptes de l’herméneutique textuelle, qui le réduisent ordinairement à une opération de cryptage par l’écriture et de décryptage par la lecture. Trouver les bonnes clés (noms, lieux, événements) et les ajuster aux bonnes serrures seraient les seuls gestes appelés par ces romans lus en détournant la tête. À rebours de cette double doxa, qui simplifie les mécanismes du genre et l’identifie à un seul de ses nombreux avatars, les contributeurs au présent volume ont relevé le défi d’examiner vraiment, en les prenant au sérieux, un corpus diversifié de romans à clés — de Balzac à Jean-Benoît Puech et Olivier Rolin en passant par Rachilde, Proust et Simone de Beauvoir —, à côté d’autres formes de travail sur la référentialité telles que l’autofiction, les notices biographiques des dictionnaires parodiques, les biographies imaginaires ou encore la métafiction dans le cinéma de Woody Allen. L’attention se trouve ici portée non seulement sur le fonctionnement des œuvres retenues, mais aussi sur les dérèglements, les pratiques ludiques et les enjeux de pouvoir qui s’y cachent. Loin d’être une simple transposition de potins littéraires, le roman à clés ouvre ainsi sur une réflexion touchant aux frontières entre fiction et référence au réel.
Notice des éditeurs
Anthony GLINOER est professeur agrégé à l’Université de Sherbrooke et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’histoire de l’édition et la sociologie du littéraire.
Michel LACROIX est professeur à l’Université du Québec à Montréal.
Ils sont tous deux membres du Groupe de recherche sur les médiations littéraires et les institutions (legremlin.org), à l’origine de travaux sur les sociabilités imaginées (Tangence, 80, 2006), la bohème (Bohème sans frontière, 2010) et les Imaginaires de la vie littéraire (avec B.-O. Dozo, 2012).